[Nuit 2] Si, si, l'Impératrice.... est morte.

Lorsque la jeune fille se retourna, tout avait disparu. Elle était plongée dans le noir le plus complet. Et en se retournant à nouveau, la Roue de la Fortune avait elle aussi disparu. Pris d'un instant de panique, la jeune fille se mit à courir. Mais rien n'y faisait. Elle était plongée dans l'obscurité la plus totale. Elle paniqua, se mit à se retourner dans tous les sens, cherchant le moindre indice d'une sortie, d'une chose à faire, d'une personne pour l'aider. Puis elle comprit. C'était surement une nouvelle épreuve des cartes.

Elle sortit son jeu de sa poche et tira la carte au sommet. C'était la numéro III. L'Impératrice. Elle scintillait, faiblement. La jeune fille remarqua alors que cette carte semblait usée, décolorée. Quelque chose n'allait pas, une fois encore. Une voix s'éleva alors :

"Seriez-vous perdu, jeune demoiselle ?"

La jeune fille se retourna et aperçut une femme encapuchonnée, bossue, s'appuyant sur une canne. Mais avec toute cette ombre, elle ne pouvait pas voir son visage. Elle en devinait à peine la silhouette. Elle n'osait pas lui répondre. Puis elle se souvint de sa première leçon apprise ici. Il fallait saisir les opportunités. Alors elle prit son courage à deux mains, et elle réfléchit à une réponse.


"Je... Oui... Enfin... Il y avait cette femme avec moi et elle a disparu. Et tout est devenu noir.  Et..."

Face à ces mots embrouillés, la vieille femme se mit à rire. La jeune fille, elle, cessa de parler et se mit à rougir. Même si cette situation était étrange, elle sentit une complicité se tisser entre elle et cette vieille dame. Ce rire n'était pas un rire moqueur. C'était un rire presque maternelle, affectueux. Alors elle se mit à sourire, timidement, en regardant ses pieds.  La vieille dame reprit la parole :

"Mon enfant, pourquoi ne pas mettre un peu d'ordre dans tes idées d'abord ? Nous ne risquons rien ici, pour l'instant. Raconte-moi ton histoire. Je suis certaine que tu trouveras la solution à ton problème."

"Eh bien, je suis la nouvelle Gardienne. Enfin, je crois. Mon grand-père m'a légué ce jeu avec des explications. Je dois accomplir un rituel pour aider les Arcanes à emprisonner le Mat. Mais les explications ne sont pas très claires. Et sans prévenir, je me suis retrouvée dans cette clairière, avec cette roue, et cette femme... Et elle m'a dit que ...."

La jeune fille s'arrêta dans son explication. En expliquant l situation calmement, tout devenait limpide. Elle n'avait pas encore finit son voyage vers le monde spirituel, c'était aussi simple que ça. La roue de la Fortune l'avait prévenue. Elle n'avait ni le pouvoir ni l'autorité pour lui faire traverser la frontière. Seule la jeune fille pouvait accomplir ce voyage au complet. Elle n'avait mis qu'un seul pied dans le monde spirituel. Tout restait à faire. Elle plongea la main gauche dans sa poche et en retira le petit calepin de notes de son grand-père sur le rituel, espérant y trouver les indications qu'il lui manquait... Lorsqu'elle releva la tête, la vieille dame avait disparu, mais la carte de l'Impératrice était redevenue comme neuve, et brillait elle aussi, de la même lueur que la Roue de la Fortune.

La jeune fille balaya l'espace devant elle avec la carte, d'un revers de la main et s'écria en même temps :

"Vingt-et-un Arcanes forment un jeu, et le vingt-deuxième s'amuse"

La carte se mit à briller de mille feux et chassa l'obscurité comme un vent traversant un brouillard. La clairière revint, aussi verdoyante et douce que la première fois. Mais au lieu de s'y trouver une roue en bois, il s'y trouva un trône en or, incrusté de pierres précieuses et dans lequel siégeait une femme au longs cheveux noirs. Aucun mot n'était nécessaire pour la jeune Gardienne, les mécanismes de ce monde commençaient à lui devenir familier. Alors elle marcha en direction de l'Impératrice, qui lui adressa la parole.

"Mon enfant, ce monde n'est pas seulement la Prison que nous, Arcanes, avions créé il y a fort longtemps pour y enfermer le Mat. Il est ton monde. Tu en es la Gardienne, ce qui t'impose des devoirs, mais tu es aussi la force dont il tire sa source, ce qui te donne aussi des droits. Comprends-le, apprivoise-le, et laisse lui la possibilité de t'aider à t'exprimer. Ta créativité est ta plus grande force. Ne l'oublie jamais. Innove, dirige, et plus que tout, exprime-toi en montrant le chemin."

La jeune fille écoutait et buvait les paroles de l'Impératrice sans broncher, telle une enfant qui écoute sa mère. Et lorsque le discours fut finit, l'Impératrice lui adressa un sourire avant de disparaître dans une explosions d'étincelles. un fois de plus, la jeune fille fut aveuglée, mais cette fois, elle ne craignait pas l'explosion. La seule question qu'il lui restait en tête était celle de sa prochaine épreuve.